Pour une transition human-centric

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Le monde de demain sera nécessairement numérique.
Il devra surtout rester centré sur l’humain, grâce à une approche volontaire et human-centric.

Les entreprises veulent être digitales (ou numériques, en bon français). Elles redoublent d’initiatives pour réussir leur transformation et achever leur transition. Elles recrutent, intègrent, forment des talents digitaux. Puis elles trouvent, testent et utilisent les derniers outils, ceux jugés les plus indispensables. Aussi, elles créent et alimentent des tableaux de bord, mesures et graphiques, qui analysent leurs performances pour y apporter optimisations et correctifs.

Da fait, l’humanité n’a jamais été aussi technophilisée que ces dernières années. On voit plus souvent les gens avoir la tête baissée au dessus de leurs écrans que consacrer du temps et de l’attention à leur environnement. Ils rédigent plus facilement des tweets qu’ils ne se motivent pour passer un coup de fil. Ils ouvrent plus naturellement Maps qu’ils ne demandent leur chemin à un passant. En tout, un individu parcourt avec son pouce l’équivalent de 2 marathons par an, poussant vers le haut, défilant vers le bas, glissant sur les côtés, pour s’informer, acheter, apprécier, matcher et s’acquitter d’à-peu-près toutes les tâches de la vie moderne.

D’où vient-il alors que les entreprises peinent tant à devenir et rester numériques alors que Homo Numericus semble triompher de tout ? Qu’elles s’échinent à faire la course derrière les technologies ?

Une partie de l’explication réside dans le fait qu’aujourd’hui les outils et process nourris de Data et d’IA fusent de toutes parts, de plus en plus vite, et avec des cycles de plus en plus courts. Que résister à ces déferlantes nécessite une quantité d’efforts. Que les mêmes slides qui il y a 5 ans servaient pour faire un peu de prospective et ouvrir des réflexions sur l’avenir peuvent aujourd’hui servir de supports pour un cours d’histoire.

Une autre partie tient au fait que les technologies émergentes sont bien plus complexes et exigeantes que le maniement d’applications mobiles. Il n’est même pas sûr que les nouvelles générations gavées aux Apps soient aussi aptes que les précédentes, nourries elles au clavier, au Ms-Dos et à la souris…

Il y a un sujet plus inquiétant, cependant. C’est ce qu’on sous-entend par transformation numérique. Souvent, ces acculturations forcenées cachent aussi une perte de contact inquiétante avec notre monde physique, alors que nous entrons à peine dans l’ère du véritable grand remplacement, celui de l’intelligence artificielle et des robots à tout faire.

Cette entrée dans une nouvelle ère réclame un autre type d’efforts pour pouvoir mettre fin à une transition digitale qui est restée jusqu’ici trop souvent exclusivement pensée à partir de et autour des outils. Ces efforts sont indispensables pour resister à un désenchantement croissant du monde, qu’on va continuer d’ignorer, jusqu’à ce qu’un jour, il nous saute droit à la figure.

Une transition mieux maitrisée et plus vertueuse consisterait à penser le progrès technique induit par les technologies en garantissant l’évitement d’une déshumanisation des individus et la sauvegarde des liens sociaux. Peu connue, mal appréciée, encore imprécise, cette approche parfois appelée human-centric est semée de difficultés. Elle se révélera de plus en plus nécessaire dans les années à venir.